La région du Nord Cameroun, jadis grenier céréalier du pays et exportateur vers les pays voisins, fait face à une crise sans précédent. Le changement climatique, longtemps perçu comme une menace lointaine, est devenu une réalité quotidienne pour les agriculteurs de Pitoa et des environs.
La sécheresse qui sévit actuellement n’est pas un phénomène isolé, mais s’inscrit dans une tendance inquiétante observée depuis plusieurs années. Les périodes de pause sèche s’allongent, les pluies deviennent erratiques, et les températures grimpent inexorablement. Cette nouvelle donne climatique bouleverse les cycles agricoles traditionnels et met en péril la sécurité alimentaire de toute une région.
Les témoignages des agriculteurs locaux sont alarmants. Dandy Emma, cultivateur de maïs et de mil, constate avec désespoir que ses champs, autrefois florissants, se dessèchent sous un soleil implacable. La production, qui atteignait jusqu’à 8 sacs par parcelle les années précédentes, est aujourd’hui réduite à néant. Litassou Edward, producteur de coton, voit quant à lui ses cultures ravagées par des chenilles, profitant de la sécheresse pour proliférer.
Face à cette situation critique, les communautés locales tentent de s’adapter. Certains agriculteurs expérimentent de nouvelles variétés de cultures plus résistantes à la sécheresse, tandis que d’autres diversifient leurs activités pour réduire leur dépendance à l’agriculture pluviale. Les autorités locales, conscientes de l’enjeu, commencent à mettre en place des programmes de formation aux techniques d’agriculture climato-intelligente.
Cependant, ces efforts risquent d’être insuffisants face à l’ampleur du défi. Yinda Martial, expert en météorologie à Garoua, souligne que les perturbations climatiques actuelles ne sont que le début d’une tendance à long terme. Sans une action concertée au niveau national et international pour lutter contre le changement climatique, la région du Nord Cameroun pourrait voir sa capacité de production agricole drastiquement réduite dans les décennies à venir.
Les conséquences de cette crise dépassent largement le cadre local. L’augmentation des prix des céréales sur les marchés locaux n’est que la partie visible de l’iceberg. À terme, c’est toute l’économie régionale qui est menacée, avec des répercussions potentielles sur la stabilité sociale et politique de la zone.
Face à ce sombre tableau, une lueur d’espoir subsiste. La crise actuelle pourrait servir de catalyseur pour une prise de conscience collective de l’urgence climatique. Elle offre l’opportunité de repenser en profondeur les modèles agricoles et de développement de la région, en mettant l’accent sur la durabilité et la résilience face aux chocs climatiques.
L’avenir du Nord Cameroun se joue maintenant. Il appartient aux acteurs locaux, nationaux et internationaux de se mobiliser pour transformer cette crise en opportunité de changement vers un futur plus durable. R.I
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