Dans un article éclairant, l’économiste Célestin Monga remet en question la distinction traditionnelle entre politique industrielle et politique économique, arguant que cette séparation est non seulement artificielle, mais aussi potentiellement trompeuse pour les décideurs politiques et le grand public.
Monga souligne que « la distinction entre politique industrielle et politique économique est fondamentalement fausse ». Il explique que presque toutes les décisions politiques et économiques ont des implications sectorielles, même lorsqu’elles sont présentées comme neutres ou horizontales.
L’auteur illustre son propos en montrant comment des politiques apparemment neutres, telles que la construction d’infrastructures ou la réglementation financière, favorisent inévitablement certains secteurs ou régions au détriment d’autres. Même les politiques sociales, souvent considérées comme universelles, peuvent avoir des effets asymétriques sur différents groupes économiques.
Un exemple frappant cité par Monga est celui du secteur bancaire américain : « La Réserve fédérale prête de l’argent aux banques à un taux d’intérêt de 1 %, que les banques utilisent ensuite pour acheter des bons du Trésor rapportant environ 4 %. » Cette pratique, selon l’auteur, équivaut à une subvention annuelle de 30 milliards de dollars, dépassant largement les aides industrielles de nombreux pays en développement.
Monga argue que la vraie question n’est pas de savoir si l’on doit utiliser la politique industrielle, mais plutôt comment le faire de manière « transparente et efficace ». Il compare cette prise de conscience à celle du personnage de Molière, Monsieur Jourdain, qui découvre qu’il parle en prose depuis toujours sans le savoir.
Cette perspective remet en question les approches conventionnelles de la politique économique et appelle à une réflexion plus nuancée sur les effets réels des interventions gouvernementales. Elle suggère que les décideurs politiques devraient être plus conscients des implications sectorielles de leurs choix, même lorsqu’ils visent des objectifs généraux.
En conclusion, l’article de Monga invite à repenser fondamentalement notre compréhension de la politique industrielle et économique. Il souligne la nécessité d’une approche plus holistique et transparente dans l’élaboration des politiques, reconnaissant que presque toutes les décisions économiques ont des effets « industriels », qu’ils soient intentionnels ou non. Cette perspective pourrait conduire à des stratégies de développement plus efficaces et équitables, en reconnaissant pleinement l’interconnexion de toutes les politiques économiques. R.E
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